Archive : Image du mois de décembre 2024

En 1710, cinq statues en granit, dont celle-ci représentant une reine, sont découvertes à Rome, dans ce qui était alors dans la Rome impériale, un pavillon édifié dans les Jardins de Salluste. Les sculptures sont acquises par le pape Clément XI qui les fait exposer au « Campidoglio » (soit au musée du Capitole) avant qu’elles ne rejoignent au XIX^e siècle le Museo gregoriano egizio.

A l’origine, les statues se trouvaient dans les jardins sur l’ordre de l’empereur Caligula (12-41). Trois d’entre elles sont des statues royales et proviennent en réalité d’Égypte : les souverains ptolémaïques Arsinoé II Philadelphe (celle du dessin ) et Ptolémée II, son frère et époux, ainsi que Tuya, mère de Ramsès II. Les deux autres représentent des versions égyptisantes de Caligula et de sa sœur Drusilla divinisés. Preuve de la fascination des empereurs romains pour l’Égypte, Caligula a fait aussi transporter un obélisque en granit depuis Alexandrie jusqu’à Rome (il se dresse aujourd’hui sur la place Saint-Pierre au Vatican).

Comme l’indique le texte en italien sur la première page de ce recueil de dessins, c’est le « cavaliere » Giovanni de Chierichelli, lié par un contrat ou mandat (?) spécial (« special chirografo ») au pape, qui s’est chargé de « faire restaurer » ces statues. De Chierichelli faisait partie de la magistrature pontificale et semble avoir travaillé comme conservateur. Il aurait fait l’intermédiaire avec le sculpteur Francesco Maratti (parfois orthographié « Moratti », ca 1669-1719 ), originaire de Padoue, qui avait déjà travaillé pour plusieurs projets de la papauté.

Les dessins nous renseignent sur l’état fragmentaire des statues à l’origine et sur leur état après restauration (« dopo risarcimento »), suite à l’intervention de Maratti. Le recueil fait office de « rapport de restauration » pour reprendre l’analyse de ce document unique faite par Brigitte Bourgeois dans son article.

La statue colossale – de 2,70m de haut – de la reine Arsinoé II Philadelphe (-316 -270 av. J.-C) la représente comme une reine égyptienne reconnaissable à ses attributs : perruque tripartite ornée de deux uraeus et collier-menat dans la main. Sur le pilier dorsal, une colonne de hiéroglyphes, parfois recopiés maladroitement, permet de l’identifier : dans le cartouche, son nom grec est retranscrit phonétiquement avec les signes « I-R-S-I-N-A ». Il est suivi d’une formule qui semble correspondre à « qui aime son frère » (« Phildalephe »)

Cette statue, ainsi que celle du roi Ptolémée II, se dressait sans doute à l’origine sur le site d’Héliopolis, au nord est du Caire.

D’autres « portraits » d’Arsinoé II sont attestés dans les collections de la BnF : elle apparaît sur plusieurs monnaies frappées en Égypte, cette fois vêtue à la grecque et avec un visage plus réaliste que celui de la statue.

 

Pour voir ce dessin, rendez-vous dans la Galerie Mazarin du Musée de la BnF où il est exposé dans une vitrine consacrée à l’égyptologie.

Pour en savoir plus

• Brigitte Bourgeois, « “Instruire par les yeux” Une documentation graphique précoce dans le domaine des antiques (xviii^e-xix^e siècles) », Technè [En ligne], 42, 2015, mis en ligne le 1^er décembre 2015
• Julien Olivier, « Les monnaies ptolémaïques de la BnF, I. La collection des rois de France (fin XVIIe-fin XVIIIe siècle)». L’Antiquité à la BnF, 2 mars 2017.

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