Archive : Image du mois de juillet 2024

Déesse mère vénérée dans l’Antiquité gréco-romaine, Cybèle symbolisait la fertilité, la nature et la protection. D’origine anatolienne, elle était souvent représentée assise, tourellée, sur un trône flanqué de lions, ou dans un char tiré par des lions. Cet animal accompagne Cybèle, puisque abandonnée par ses parents elle aurait été élevée par ces fauves. Son culte était célèbre pour ses cérémonies spectaculaires, tel que des rituels de castration que répétaient chaque année les prêtres de la déesse, plongeant les pratiquants dans des transes extatiques.

La vénération de Cybèle s’est répandue à travers l’Empire romain. Les Romains l’associaient à la terre, à la fécondité et à la puissance, en la considérant comme une figure maternelle et protectrice. Toutefois les pratiques rituelles pouvaient être différentes – une loi romaine interdisait la castration – mettant en avant des éléments de la nature qui font référence au mythe : par exemple le pin abattu représentant Attis mort.

La BnF conserve une poignée dite de “Cybèle et Attis”. Cet objet a été retrouvé à Bavay. En bronze et d’une longueur de 18 cm, il date probablement de la seconde moitié du II^e siècle après Jésus-Christ. La composition iconographique assemble les principaux éléments propres au mythe de Cybèle. La déesse est au centre, encadrée de deux lions. Aux deux extrémités sont deux bustes d’Attis, identifiables grâce aux pommes de pin qu’ils surplombent. Cette représentation fait écho au récit de Diodore de Sicile (Histoire universelle, III, 30), qui rapporte l’histoire de Cybèle et d’Attis. Le mythe relate l’histoire d’un homme, Attis, dont Cybèle était éperdument amoureuse et qui s’est donné la mort sous un pin avant d’être ressuscité par la déesse.

Cybèle et son culte sont aussi représentés sur des monnaies de plusieurs cités grecques à l’époque romaine.

Au droit de cet exemplaire figure un buste drapé de l’impératrice Julia Domna à droite ; son nom et son titre impérial sont confirmés par la légende IOVΛIA ΔOMNA CE . Au revers Cybèle est représentée assise à gauche, une phiale dans la main droite et une palme dans la main gauche, le bras reposant sur un tympanon. A ses pieds apparaît un lion. La légende est l’ethnique KOΛBACEΩN, donnant le nom de l’autorité qui a émis cette monnaie : la polis de Colbasa, en Pisidie.

L’iconographie de cette monnaie met en lumière deux aspects. Tout d’abord, il est important de noter que depuis l’époque de Domitien, il est courant de représenter les impératrices sur les monnaies, ce qui souligne leur rôle politique significatif. A l’instar des autres impératrices de la dynastie des Sévères, Julia Domna, a joué un rôle fondamental. Cependant, il est pertinent de souligner l’origine syrienne de Domna et son association possible avec des divinités orientales, telles que Cybèle. Cette dimension culturelle et symbolique peut enrichir notre compréhension de son influence dans l’Empire romain. Cela peut montrer également son lien fort avec son fils Caracalla qui continua à Rome à représenter Julia Domna avec Cybèle sur des deniers.

Déjà Faustine  la Jeune et Lucilla, deux impératrices sous le règne des Antonins, étaient présentes sur des pièces aux côtés de Cybèle, partageant cette connexion iconographique. Cette représentation conjointe renvoyait probablement à leur rôle en tant que figures maternelles protectrices de l’Empire.

Les monnaies provinciales, émises dans la partie orientale de l’Empire, sont un support important de l’affirmation de l’identité culturelle grecque. La représentation de Cybèle sur ces pièces constituait ainsi l’identité culturelle et religieuse locale, ainsi que la reconnaissance de la déesse en tant que figure puissante et protectrice pour les habitants. La consultation des types monétaires enregistrés sur le site du projet Roman Provincial Coinage livre aujourd’hui pas moins de 646 types monétaires différents répartis entre 122 cités.

Si la plupart des représentations de Cybèle se concentrent en Asie Mineure, d’autres sont connues en Grèce, en Thrace, jusqu’au bord de la mer Noire, et même en Phénicie et en Égypte. Ces représentations sont de fait un témoignage important de la diffusion et de la popularité de la déesse mère dans de nombreuses régions de l’Empire.

Bérénice Lecaplain Frichu

 

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